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Sunday, July 29, 2018

Mykonos et l'art de vie grec

On doit tant à la Grèce ! Pas seulement l'alphabet et les fondements de toute la culture occidentale, mais aussi jusqu'au nom de tout un continent. Zeus, sous la forme d'un taureau ailé enlève Europe [Εὐρώπη], princesse de Sidon, sur les rives de Phénicie pour se poser en Crête, pays de son enfance.
Chapelle orthodoxe
Souvenirs d'un mythe du taureau et d'une chèvre nourricière, deux animaux dont les cornes ne cesseront de hanter les trois côtes continentales du bassin méditerranéen. L'un des deux enfants de cet accouplement sera le roi Minos. Quant à Cadmos [
Κάδμος], frère d'Europe, parti à sa recherche, il deviendra le fondateur de la ville de Thèbes [Θῆϐαι], en Béotie. Ce mythe révèle déjà l'interaction entre les rivages du Proche Orient et les eaux de la mer Égée. 
Un mythe similaire évoque le ville phénicienne de Tyr. Les déconvenues de la princesse Élyssa, l'obligèrent à partir. la reine Didon, Fondatrice de Carthage, elle en devint la reine Didon. 'L'Énéïde' de Virgile relate l'idylle qu'elle eut avec le héros troyen, Énée, avant son départ pour l'Italie. 
Les Hellènes ont, de tout temps, servi de trait d'union entre les trois continents baignés par le bassin méditerranéen.

La Grèce demeure synonyme d'un art de vie qui a vraisemblablement influencé tout le pourtour de la Méditerranée. Cela se matérialise de deux manières : un style architectural unique et une cuisine, qui a la réputation d'être l'une des plus saines qui soit.

L'habitat grec est composé d'ombre et de lumière. Peut-être s'agit-il de l'expression d'une antique
Moulin à vent
spiritualité ! Comme Ré en Égypte, Zeus, porteur de la foudre, était Soleil, avant même qu'Apollon [
Ἀπόλλων], dieu de la Lumière par son nom grec Phœbus [Φοῖβος, la lumière], en devienne conducteur de char. Cette lumière est tout autant physique que spirituelle. L'oracle de Delphes [Δελφοί] n'était-il pas celui de la voix d'Apollon ? Et puisque l'on évoque l'île de Mykonos, il st bon de rappeler que l'île voisine n'est autre que Délos [Δήλος], lieu de naissance de Phœebus /Apollon ! Lumière du jour et ombres de la Nuit (aux traits de la déesse Nyx, Νύξ)se rencontraient au dessus des flots du Titan Okeanos [Ὠκεανός]. Il s'agit d'une dualité latente entre le feu du ciel et l'eau, entre un dieu et une déesse, la mer et la terre, ou encore par le cycle du jour et de la nuit. 
Simplicité des formes
Le village grec est composé de cubes superposés, souvent accrochés à flanc de colline, a mi-chemin entre le bleu marin et l'azur du ciel. Il est le point de rencontre d'une triade : eau/terre/air. Et dans cet espace de communion entre les puissances souterraines, marines et célestes, il se doit d'exprimer la pureté en se parant d'une blancheur immaculée. Quelques touches de couleur viennent ensuite rehausser le tableau. Et pour se protéger du feu du ciel, on se dote d'une zone d'ombre en imaginant des ruelles si serrées qu'elles font office de zone de protection. Ce jeu d'ombres et de lumières s'intègre alors dans un cadre terrestre et marin, car la proximité de la mer est omniprésente dans cet espace composé d'un chapelet d'îles et de côtes éminemment découpées. 
Les peuples méditerranéens ont ainsi généré des races de marins : les Phéniciens, les Grecs, les Romains, puis les Ottomans et les Vénitiens. 
L'héritage du passé se retrouve dans celui de la table. La cuisine est devenue légendaire, à la fois par sa simplicité frugale et son impact, bénéfique à la santé des hommes. À cet égard, la Crète joue d'ailleurs un rôle d'avant-garde. La cuisine nippone en est devenue une seconde version de nos jours. 
Quels sont donc les ingrédients composant la cuisine grecque ? Ils sont principalement végétariens et
Importance de la pêche
assez peu carnés. Dans la Grèce ancienne, on ne mangeait de la viande – de bœuf surtout – qu'à l'occasion des cérémonies dédiées aux dieux. La présence de la mer a donc sollicité l'utilisation du poisson et des produits comme les poulpes ou les calamars. On utilise ensuite trois légumes de base : les tomates, les courgettes et les aubergines, dont le goût est souvent relevé par l'ail et l'utilisation de plantes aromatiques ou d'épices, comme le cumin. La Grèce étant par excellence le pays de l'olivier, les olives vertes, noires, ou parfois ambrées, sont largement consommées au même titre que l'huile d'olive vierge, dont on ne cesse d'en vanter les qualités. Cette cuisine fait appel aussi à une sélection variées de viandes plutôt blanches, telles que l'agneau, le mouton, les volailles, parfois aussi le porc et le lapin. Le fromage (la 
fêta) accompagne traditionnellement la salade. On mange un pain plat (la pita) pendant le repas. Le yaourt et le miel constituent deux autres mets essentiels. Certains desserts enfin sont à base de noix et de miel. À cela, il ne faudrait pas non plus oublier le vin. 
La table grecque semble être le reflet terrestre de la nourriture des immortels faite de nectar et d'ambroisie.
Tous ces produits naturels rendent la cuisine diététique. Si bien que l'Unesco l'a d'ailleurs désigné comme étant un patrimoine culturel immatériel de l'humanité (2010). 

En parcourant l'île de Mykonos, c'est donc un peu cet héritage que je cherchais, loin de la foule des touristes avides surtout de mer et de soleil.
L'ombre et la lumière
Les lignes sobres de l'architecture font appel à la géométrie de la ligne, celle qui caractérise, les proportions du temple grec. L'harmonie des couleurs est toujours rehaussée par la blancheur immaculée des murs rejetant le soleil au profit de l'ombre. Cela rappelle également cet 'Éloge de l'Ombre' décrite par l'écrivain japonais Junichiro Tanizaki. L'habitat est dépouillé de tout ornement. Les fioritures étaient utilisées pour honorer les dieux dans les édifices qui leurs étaient dédiés. Les mortels devaient se complaire dans l'humilité. Toutefois, cette simplicité n'est pas dépourvue d'esthétique – autre caractéristique héritée de l'Antiquité. Elle est souvent mise en valeur par un détail pouvant soit être végétal, floral ou tout simplement décoratif, comme une cruche ou une jarre. Parfois aussi, une simple table et quelques chaises, voire un banc, rappellent que cet ensemble est communautaire et que l'on partage volontiers avec les voisins, un même idéal de paix et de bien-être.
Fait étrange, cette description siérait d'une certaine manière, à celle de la civilisation nippone. 
Et dans ce dédale de ruelles et d'escaliers, où l'on s'attend toujours à rencontrer l'inattendu, je ne pouvais pas m'empêcher non plus d'évoquer à quel point cette âme purement méditerranéenne a pu s'égrener tout autour de son bassin. Les images des ruelles de Cordoue en Andalousie, d'Asilah au Maroc, de Sidi Bou Saïd en Tunisie, ou de Capri et d'Ischia en Italie, me revenaient sans cesse ! Chacun a son génie du décor. Le grec garde une empreinte distincte.

Voici donc un témoignage illustré par une galerie de photos présentées selon trois thèmes en harmonie avec la réflexion précédente.
Christian Sorand

Un environnement composé de lumières : eau/ terre / ciel.
Une terre brûlée par le soleil, mais resplendissante par la limpidité de ses flots et un ciel éclatant de pureté.
Ornos Bay & Hora in the background
Rencontre du ciel, de la terre et de la mer
La palette des couleurs de l'eau

Lumière et ombre marine
L'espace urbain entre ciel et mer
La rencontre du ciel et de la mer au couchant
Les lignes de l'architecture de Mykonos : l'ombre et la lumière.
L'art grec se caractérise par la pureté de sa géométrie et le choix épuré de sa touche décorative. Il est l'expression visuelle d'une droiture d'esprit sollicitant la clarté, doublée d'une aisance communicative sans détour.
Les toits de Hora, ville principale de Mykonos
Terrasse sur une baie
Ruelle de Mykonos
Escaliers extérieurs
Banc dans une rue du village
Panorama de la Petite Venise
L'escalier d'une boutique
L'entrée d'une petite maison
Cheminée d'aération
Rue en escaliers
Un simple lieu de repos dans une rue
Chapelle orthodoxe perchée sur un rocher avec la mer et le ciel pour horizon
Un crique, rencontre des trois éléments.
Et quelques évocations de la table grecque, reflet des produits naturels.
Les produits terrestres de Déméter, comme ceux marins de Théthys, sont un don du ciel, célébrés dans leur simplicité naturelle pour le bien être des hommes.
Restaurant d'Ornos
Salade grecque
Citrons sur la table d'une terrasse
Les ingrédients de la salade grecque
Moussaka

Friday, July 27, 2018

Le Vieux Nice

L'âme vagabonde d'un quartier haut en couleurs
Plan du Vieux Nice
Quand on évoque la Ville de Nice, on pense d'emblée à la Promenade des Anglais, à ses plages de la Baie des Anges, ou encore à quelques uns de ses lieux iconiques : la Place Masséna, l'ancien Palais de la Méditerranée (le Casino), la Villa Masséna (aujourd'hui un musée) ou au vénérable Hôtel Négresco
Pourtant, la mondanité de Nice s'estompe lorsqu'on pénètre dans ce qu'il est convenu d'appeler le Vieux Nice. 
Fontaine près du Vieux Nice
Fondée par la colonie phocéenne de Marseille, Nikaia fut d'abord grecque, avant d'être romaine, puis italienne. Car ce n'est qu'après le Traité de Turin, en 1860, que Nice devint française. 
Plus que tout autre, le quartier du Vieux Nice, conserve son caractère médiéval, mais fortement imprégné d'un style italien et si typiquement méditerranéen. Ici, soudain, tout devient autre. Le quartier est tout entier dévoué aux piétons. Les bruits de la ville s'estompent. La panoplie pastel de toutes les couleurs éclairent un espace réservé à la fraîcheur de l'ombre dans ce pays de grand soleil. L'inattendu est omniprésent : ruelles tortueuses, échoppes perdues dans le temps, petits restaurants typiques aux effluves italiennes, bref, une atmosphère contribuant à en faire un havre pour le plus grand plaisir de ses nombreux visiteurs. Autrefois quartier défavorisé, le Vieux Nice est dorénavant un lieu touristique incontournable. Délimité par la mer, la Colline du Château et la coulée
Le clocher de la cathédrale
verte du Paillon, le Vieux Nice renferme aussi quelques édifices niçois tels que l'
Opéra, le Palais de Justice, la Mairie, ou encore la cathédrale baroque Sainte-Réparate. À deux pas du Quai des États-Unis (prolongement de la Promenade des Anglais), le Cours Saleya est devenu un marché aux fleurs, aux antiquité, et surtout aux produits artisanaux, sentant bon le savon et la lavande. En fin de journée, cet espace garde une saveur nocturne grâce à ses nombreux restaurants, certains spécialisés dans les fruits de mer. Le dédale des ruelles du Vieux Nice abrite aussi un ancien palais du XVIIe (le Palais Lascaris) devenu un musée. De jour,
Nef de la cathédrale
comme de nuit, ce vieux quartier s'anime pourtant. On y vient pour chiner l'insolite, chercher l'ombre, s'imprégner de l'atmosphère du sud, y déguster le parfum sublime des glaces italiennes, s'asseoir à la terrasse d'un troquet craquant. La prolifération des petits restaurants complète la quête des saveurs exotiques : italienne bien sûr et surtout, mais aussi grecque, provençale, turque et de surcroit, orientale à souhait : maghrébine, indienne, vietnamienne et même thaïe (restaurant 'Le Banthai').
Le vieux Nice, ce beau quartier typique, est devenu un lieu incontournable, comme sa popularité le démontre à toute heure de la journée.
Christian Sorand

Liens :

Dans le Vieux Nice
Ruelle typique
Au marché aux fleurs
Une rue la nuit
Entrée du Vieux Nice depuis le Paillon

Thursday, July 26, 2018

DOLCEACQUA, Ligurie

L'étrange petit joyau d'une vallée ligure

Perched on a hill in a narrow valley of Liguria, Dolceacqua is a stunning medieval village. Its name means 'freshwater' ['acqua dolce' in Italian]. The clear waters of the Nervia River form a bend at the foot of the hill crowned with an imposing castle. Seen from a distance, there is nothing particularly unusual, as others Mediterranean sites are no less different. Yet, once you start walking into the historic part known as 'La Terra' – and there is no other way to go – you are literally blown away by what you can see! A maze of narrow alleys – some made of stairs – crisscross the hill, forming at times a sort of tunnel under tall stone houses. A totally disconcerting sight that appears to be unique!

The old bridge over the Nervia River
Encore assez peu connu, voici un site étonnant, situé dans une vallée ligure, à quelques kilomètres seulement au sud de la ville frontière de Vintimille [Vintmiglia].
Capteurs d'eau de pluie
Le nom de ce village de montagne résonne déjà d'un certaine poésie : acqua dolce, « eau douce ». Il est vrai que les eaux claires d'un torrent alpin, la Nervia, serpente au pied de l'éminence où se blottit la petite agglomération médiévale portant le nom de La Terra. On aperçoit le formidable château fort qui la coiffe de très loin (le château des Doria). Cela ne fait qu'attiser la curiosité. Alors, on s'arrête et on découvre un surprenant cadre bucolique au fond de cette vallée de la Nervia. Un large pont de pierre, à la romaine, surplombe la rivière, invitant les visiteurs à le franchir pour s'aventurer dans les dédales d'une cité moyenâgeuse absolument incroyable ! Car, certes, Dolceacqua est véritablement un lieu fabuleux, digne de figurer dans la mémoire d'un conte légendaire. Tel qu'on pourrait l'imaginer en lisant des récits chevaleresques !
Il faut être suffisamment en forme pour parcourir l'extraordinaire
Mystérieux passages
labyrinthe des ruelles de la cité, tantôt couvertes comme autant de tunnels, tantôt gravissant la colline par une envolée d'escaliers. On a peine à imaginer l'existence d'un tel ensemble, dont l'audace architecturale dépasse l'entendement ! À priori, on pourrait croire que l'état des lieux soit un tant soit peu laissé à l'abandon, un peu comme les remparts de la citadelle pointant à la crête. Or, pas du tout, on y découvre une petite communauté de boutiques et de galeries d'art ! En réalité, Dolceacqua a été investie par des artistes, sans doute inspirés par la beauté du lieu. Ainsi, un grand nombre de bâtisses de pierre ont été
Porte en bois rénovée
rénovées. Des portes de bois, clairement refaites, incitent la curiosité du visiteur à en frapper le heurtoir, dans le seul but d'en admirer l'agencement du décor. Fort heureusement, certaines de ces portes sont déjà ouvertes sur des galeries de peintures, laissant apercevoir, par la même occasion, l'architecture intérieure. 
Quelques restaurants et même des maisons d'hôtes accueillent les voyageurs souhaitant s'y poser. Au bas du village, les bords de la rivière sont ombragés, plantés de quelques bancs, et la vaste place communale s'étale devant une belle église baroque (Sant'Antonio Abate) dont l'intérieur reflète la beauté du site.
Dolceacqua, sans nul doute, demeure une tendre découverte, un véritable joyau ligure médiéval tellement inattendu.
Christian Sorand

Panorama depuis le château
L'église baroque de Dolceacqua
Placette à une entrée de Terra
Côté rivière
Ruelle principale
Un coin paisible de Terra
Haut du village
Entrée fleurie
Fontaine à une intersection
Bâtisse en haut du village
À la croisée de deux ruelles superposées
Ruelle ouverte en haut de colline
Une boutique du village
Place de l'église
Sant'Antonio Abate
Nef baroque de l'église du XVIIe
Détail du plafond de l'église
Vue générale de Dolceacqua depuis la rivière