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LITTERATURE: II - 'La Vallée des Rubis' de Joseph Kessel

Il reste à évoquer plus amplement deux écrivains francophones qui feront l'objet d'une étude détaillée. Il s'agit de deux académiciens : Joseph Kessel et Jean-Christophe Rufin.
Joseph Kessel peut être rangé au même rang qu'André Malraux pour sa vie de grand baroudeur façonnée de rencontres hors du commun, et surtout pour le fait d'avoir traversé un siècle en ébullition, à une époque où les voyages n'étaient pas aussi aisés que de nos jours.
Jean-Christophe Rufin, qui manie la langue française avec une grande dextérité, s'est fait connaître plus récemment grâce à son histoire romancée de la conquête du Brésil, à la Renaissance, (« Rouge Brésil », 2001), ouvrage qui fut couronné du prix Goncourt la même année que sa parution.
Ces deux auteurs ont chacun beaucoup écrit sur les terres lointaines, propices à l'aventure et à l'imaginaire sous toutes ses formes.


II - « La Vallée des Rubis », de Joseph Kessel

Joseph Kessel
Joseph Kessel (1898-1979) se hisse au même rang qu'André Malraux ou qu'Ernest Hemingway. Comme eux, il appartient au XXe siècle et surtout, il a vécu pareillement une vie exceptionnelle d'aventures et de découvertes. Il fut pareillement un homme d'action pendant les deux guerres mondiales.
La seule différence réside dans le parcours de sa vie. Né en Argentine, de parents juifs émigrés russes ayant choisi la France pour terre d'accueil, tel fut le cas pour un grand nombre de migrants russes de cette époque, sa vie apparaît d'emblée comme dédiée aux voyages. Engagé volontaire, pilote, journaliste, il est témoin des premiers grands événements du siècle : la révolution irlandaise, la naissance d'Israël, la guerre d'Espagne, à l'instar de Malraux ('Les Combattants') et d'Hemingway ('Pour Qui Sonne le Glas'). A Londres, il écrit avec son neveu Maurice Druon le 'Chant des Partisans'. Il participe aussi à l'épopée de l'Aéropostale (Vent de Sable, 1929), avec Saint Éxupéry ou son ami Mermoz, dont il écrit la biographie dans une œuvre éponyme ('Mermoz',1938). On connaît aussi Kessel pour 'Le Lion' (1958) ou pour son roman célèbre sur l'Afghanistan 'Les Cavaliers'(1967). Prolifique, on oublie parfois certains autres récits dont il est l'auteur.
Ainsi en est-il pour 'La Vallée des Rubis'(1955). Roman ? Récit ? Probablement un peu les deux à la fois. Plus récit que roman ; disons simplement un récit romancé. L'emploi du je n'est pas forcément un élément autobiographique, comme James Joyce, maître incontesté de l'introspection l'a démontré au début du XXe siècle. Mais dans le cas de Joseph Kessel, on ne peut séparer le personnage de ses voyages ni de ses réactions de journaliste, auxquels s'ajoutent évidemment les talents de l'écrivain romancier.

C'est un heureux hasard récent qui m'a conduit à découvrir cet ouvrage de Kessel. Il se trouve que j'ai
Couverture Folio
toujours été passionné par les roches et les minéraux. Collectionneur depuis l'adolescence, l'histoire des pierres précieuses continue toujours d'exercer une grande fascination. L'Alliance Française de Bangkok a récemment proposé un atelier de gemmologie. Bien évidemment, j'y ai participé d'autant plus qu'il était dispensé par un jeune et imminent professeur en gemmologie français, établi à Bangkok. C'est ainsi que j'ai découvert que la
Cité des Anges était le centre mondial des pierres précieuses. C'est également dans ce cours que notre intervenant a évoqué 'La Vallée des Rubis' de Joseph Kessel. J'avais déjà lu plusieurs fois 'L'Étoile du Sud' de Jules Verne, et aussi 'L'Or' de Blaise Cendrars, mais je ne connaissais pas encore l'ouvrage de Kessel. Qui plus est, son cadre est la Birmanie, pays voisin fascinant et visité déjà à plusieurs reprises. Fort heureusement, Carnets d'Asie, la librairie francophone de l'Alliance Française, en avait quelques exemplaires.
Après avoir littéralement dévoré cette œuvre, j'ai cherché quelques critiques littéraires. L'histoire met en scène le narrateur, Jean, son ami parisien, négociant en pierres précieuses, et son associé local, Julius. Le récit se construit autour de ces trois protagonistes qui se rencontrent tout d'abord dans la grisaille parisienne. Très vite, on évoque la Birmanie et les célèbres mines de Mogok, royaume incontesté du rubis depuis des siècles.« Il y avait, disaient-ils, dans la Birmanie du Nord, bien au-dessus de Mandalay, parmi les hautes collines recouvertes de jungle, il y avait une vallée qui portait le nom de Mogok. Là-bas, du fond des âges, et le long des ruisseaux, dans les entrailles des roches, au flanc des monts, reposaient, enveloppés dans leur robe de minerai brut, les rubis précieux.Là – et là seulement. » [ch.I, p14] Les collectionneurs savent que le rubis est à la Birmanie ce que le diamant est à l'Afrique du Sud, le saphir au Cachemire et à Sri Lanka, l'émeraude, à la Colombie ou l'opale, à l'Australie. Alors un long voyage commence à une époque où les vols intercontinentaux en étaient encore à leurs balbutiements. Après Londres, voici l'escale de Bombay. Car les gemmologues savent que si les Thaïlandais sont passés maîtres dans la connaissance et le marché des pierres précieuses, ce sont surtout les Indiens qui dominent les achats du commerce mondial. On arrive enfin à Rangoun, à une époque où la Birmanie n'était déjà plus une colonie britannique. Le voyage se poursuit encore car Mogok est tout au nord du pays, dans une jungle entourée de montagnes.
On découvre alors ce lieu magique par le biais de la plume envoûtante et parfois poétique de Kessel. On y rencontre les personnages clés de ces lieux lointains et exotiques. Ils sont pour la plupart birmans bien sûr, mais aussi indiens, chinois, tibétains, et même anglais ou américains. Dans la critique de Bernard Moussette, on trouve ceci : « cette écriture journaliste empêche la narration de prendre le pas, et empêche donc de rentrer plus profondément dans les personnages du livre, pour donner une véritable stature aux personnage. Il faut dire que les personnages rencontrés sont assez intriguant, donc on a le désire d’en savoir plus, non pas dans leurs histoires, cela Kessel le fait très bien, mais c’est sur le moment que l’on se sent lésé. Leurs pensées , leurs réactions, la dimension psychologique finalement n’est pas traitée. » (Le texte est reproduit avec l'orthographe d'origine). La remarque sur l'introspection des personnages est exacte, mais il faut y ajouter deux analyses complémentaires. D'abord, il ne s'agit pas d'un roman. Dans une œuvre romanesque, l'auteur peut se permettre « de rentrer plus profondément dans les personnages » puisqu'ils appartiennent à l'imaginaire du romancier. Or il s'agit bien d'un récit journalistique, qui plus est, est confronté au masque des intervenants. Il faut en effet replacer les personnages rencontrés dans leur contexte et leur époque. Celui qui a longtemps vécu en Asie comprendra aisément qu'il est souvent difficile de pénétrer dans l'univers introverti des Asiatiques et que seules une longue habitude et souvent une connaissance linguistique permettent d'en cerner en partie le caractère. Raison de plus, pour un visiteur de passage, qui a toutes les chances d'être confronté de plein fouet à un choc culturel inévitable. D'autant plus que nous parlons d'une époque déjà lointaine, dans un milieu particulièrement fermé et isolé. Seul le personnage d'un Julius, ou celui des vieux coloniaux anglais du crû, pourrait en parler de manière différente. Voilà pourquoi Kessel ne peut les décrire qu'en les observant de l'extérieur. Ces personnages sont réels. Ce ne sont pas les protagonistes d'un roman. Quant à dire : « Esthétiquement, je n’aime pas non plus les rubis ; ce rouge éclatant qui laisse passer la lumière, ce « sang de pigeon » comme on dit, voilà bien un caprice de riche, puisque que finalement il s’agit de cela, les pauvres qui triment et crèvent pour que les riches puissent se pâmer. C’est bien dommage que Joseph Kessel ne parle pas de cela. C’est ma dernière pointe de déception. Kessel ne donne à aucun moment une dimension sociale et politique à son livre. » On peut très bien comprendre cette analyse personnelle qui fait état d'une certaine vérité de fait. Or, d'une part ce n'était vraisemblablement pas le but recherché par Kessel, tout journaliste qu'il était, ni même du goût de son époque. En tout état de cause, l'écrivain qui se respecte, ne doit pas dénoncer un phénomène 'socio-politique' à la manière d'un journaliste. L'art de l'écrivain est de suggérer implicitement, tout en provoquant le lecteur. C'est bien ce que Kessel fait. Que Kessel enfin puisse aussi être extasié par ce qu'il voit (« Il est vrai que tout semble beau pour Kessel, c’est quand même un peu louche »), il n'y a là rien de véritablement 'louche' en soit. Encore une fois, il faut replacer ce récit dans le contexte et la période pendant lesquels il a été rédigé. Combien de personnes – à cette époque-là – ont eu la chance de pouvoir se rendre dans cette lointaine et mystérieuse Mogok ? Voici ce qu'il écrit à ce sujet : « J'avais le souvenir de marchés magnifiques, depuis le Sud Marocain jusqu'à l'Afrique noire et celui de Zanzibar et celui de Bahia. Et les marchés d'Arabie et les marchés des Indes. Mais aucun ne valait pour la délicatesse des nuances, pour la propreté de la foule, pour la gentille dignité des visages, et pour la douceur majestueuse du décor, pour l'invitation au rêve – aucun ne valait le marché de Tchaïpin, en Haute Birmanie. C'était, figuré dans son petit peuple, l'Orient profond, intact, authentique et sage, l'Orient de la route de la soie, de Marco Polo, et de la sereine lumière bouddhique.Pour achever ce spectacle sans pareil, le marché de Tchaïpin, parmi les rangs aux légumes, aux fruits, aux tissus et aux herbes, offrait, tout simplement, tout naturellement, le rang des rubis. » [ch.14, p.187] Que Kessel ait trouvé ce lieu et les gens rencontrés fascinants, rien d'étonnant pour un grand voyageur qui découvre soudain une terre lointaine, exotique, peuplée d'êtres différents et captivants. Les Français sont parfois un peu trop critiques et il leur manque bien souvent cette humilité qui ne leur permet pas d'avoir le regard des indigènes. La lecture de Claude Lévi-Strauss ('Races et Cultures', par exemple) pemettrait vraisemblablement de s'approprier le point de vue de l'Autre. Sans vouloir partager l'optimisme utopique de Rousseau, il ne s'agit pas non plus d'être Voltairien. On peut très bien imaginer que pour Joseph Kessel « tout semble beau ». Libre au lecteur, ensuite, de faire la part des choses, à sa guise. D'ailleurs, tout à la fin de son récit, Kessel écrit ceci : « Mais que m'importaient après tout ces pierres, même les plus précieuses, ces cailloux, même les plus rares et de la teinte du sang le plus pur ! Ce qui tout à coup m'étreignait d'une nostalgie invincible, c'était le souvenir, déjà le souvenir, du petit peuple enfermé dans sa vallée close. » [ch.XVII, p.253]. Alors si l'écrivain n'a pas pu pénétrer davantage dans la pensée de ce « petit peuple », c'est qu'il n'en avait tout simplement pas les moyens à ce stade. Et que donc, ce qui émeut l'auteur, c'est d'avoir pu entrer en contact avec une autre culture. C'est d'ailleurs un peu la même démarche qu'essaye de faire cet autre écrivain voyageur contemporain : Jean-Christophe Rufin ('Rouge Brésil', 'Asmara ou les Causes Perdues'). J-C Rufin est lui aussi académicien, mais avant tout médecin sans frontières. Il est resté humaniste dans l'âme, et s'efforce d'explorer les origines du choc des cultures. A la différence de
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Kessel, J-C Rufin, n'est pas un voyageur qui passe. C'est un expatrié solitaire qui prend la peine de comprendre l'autre patiemment, au fil du temps et des années, comme l'avait fait avant lui George Orwell, précurseur avant l'heure, dans son ouvrage sur la Birmanie ('Burmese Days').
Le long voyage vers Mogok permet à Kessel de dépeindre les escales. Celle de Bombay – connue aujourd'hui comme étant Mumbaï – est ainsi évoquée : « [...] Bombay est une ville prodigieuse, sans forme ni fin, où la mer étincelle, où le soleil foudroie, où hurlent les couleurs, [...] » [ch.I, p.27] « Bombay, c'est la ville où les édifices publics ressemblent à des palais et à des cathédrales ; où, dans les gares immenses, les parcs, les rues, dorment des centaines de milliers d'hommes qui n'ont jamais et n'auront jamais d'autre logis, où fument les usines, où trottent les rickshaws ; où s'épanouissent les fleurs violentes, où grouillent, grouillent les places, les marchés, les bazars, les ruelles les avenues et les temples ; […] » [ch.II, pp.27-28]. A Rangoun, capitale de la Birmanie d'alors, on sent l'éblouissement de l'auteur visitant l'ineffable Pagode de Scwedagon, l'une des plus belles au monde : « Par une chance rare, je me suis trouvé le soir du même hour dans un lieu qui offrair en ineffable paix spirituelle, une réplique aux dernières paroles de Ghandi. La pagode de Schwedagon. Elle coiffait une haute colline située à six kilomètres de Rangoun. On voyait de loin cet ensemble fantastique de coupoles étranges, de voûtes torturées et d'aiguilles géantes qui, toutes, étaient recouvertes de feuilles d'or fin. Extraordinaire cité de la foi la plus antique et la plus gracieuse. Enceinte merveilleuse ouverte à chacun... » [ch.IV, p.55]. Après Mandalay, qu'il évoquera comme 'la ville des villes' [ch.XVI, p.230], voici Momeik, dans les états Chan du nord de la Birmanie. « La ville de Momeik était un quadrilatère poussiéreux et mélancolique de maisons en bois de tek, presque toutes pareilles, élevées sur pilotis pour les protéger contre les inondations aux saisons des pluies et dont les larges fenêtres sans vitres étaient protégées par des lattes qui se repliaent les unes sur les autres autour de barreaux de fer pour donner le plus d'aération possible. Si bien qu'elles ressemblaient à des cages suspendues. Seuls, donnaient de plain-pied sur la rue principale, les magasins des commerçants hindous et quelques boutiques avec des auvents de chaume sous lesquels on mangeait des nourritures chaudes et où l'ont jouait au mah-jong. » [ch.V, p.73]. On arrive enfin dans la vallée de Mogok, but ultime de ce voyage. « Mogok se trouve au creux d'une magnifique vallée située à huit cents mètres d'altitude et se développe autour d'un lac. Des collines et des chaînes de montagnes couvertes d'une végétation sauvage dominent de toutes parts cette cille, ou plutôt cette grande bourgade qui compte, au plus, dix mille habitants.[...] La partie de la ville haute bâtie sur la rive opposée du lac est beaucoup plus réduite et plus pauvre.Sur les hauteurs s'élèvent des pagodes. Les plus neuves sont d'une blancheur éclatante et sommées d'aiguilles d'or. Les pierres ruineuses des autres ont pris la couleur du bronze. » [ch.VII, p.85].
Carte de la région de Mogol
Alors commence le récit sur les mines de rubis de Mogok. Ce lieu, qui depuis des siècles a été à l'origine des plus beaux rubis du monde. « 
En vérité, il a fallu des milliers de millénaires pour que, au creux des entrailles terrestres en convulsions dans un immense chaudron d'enfer, la flamme et la lave, les acides bouillonnants et les éruptions gigantesques forment cette bande de calcaire cristallin où reposent les cailloux précieux de la vallée birmane. Elle contient les spinels rouges, rosés, violets ou noirs et le péridot, qui est l'émeraude de Mogok, et la rutilante pierre de lune et le lapis-lazuli. Elle recèle même – et on n'en trouve de plus beaux qu'au Cachemire – le saphir couleur de bleuet et le saphir blanc ou encore le saphir étoilé avec son astre à six branches. Mais surtout, mais exclusivement, c'est le gîte du rubis, roi de toutes les gemmes. » [ch.VI, p.79]. On a rarement aussi bien décrit le monde des pierres
Rubis
précieuses. Il évoque alors ce rouge fascinant, appelé 'sang de pigeon' qui consacre le rubis, 'roi de toutes les gemmes' : « 
Celui-ci, pour la teinte, ressemble aux pétales des jeunes roses. Et la lumière en même temps le traverse et en rejaillit - colorée par le rubis – comme d'une source purifiée par lui comme par un feu qui ne laisse pas de cendres. Cette pierre est animée. Elle respire, elle chante au soleil comme à la clarté des lampes. Elle vit. […] Voilà ce que nous appelons Sang de Pigeon. […] Le mot birman est Ko Dwei et les Indiens – qui ont inventé l'expression – eux, disent Kabooterka Xyn. » [ch.VIII, p.106].
On voit comment ce récit de voyage exotique mêle tout à la fois, découverte, émerveillement, aventure, tout en rendant cette extraordinaire passion née de la fascination provoquée par les gemmes. « Il en fut ainsi pour moi du jour où mon ami Jean, marchand en pierres précieuses, m'eut décidé à le suivre jusqu'à Mogok, haute vallée birmane et seule terre au monde où l'on trouve le rubis. Dès lors, je n'appartins plus entièrement à ce qui m'entourait. » [ch.I,pp.17-18].

Les mines de Mogok sont toujours en activité, même si elles ne recèlent plus autant de pierres rares depuis un certain temps déjà. Il faut dire que l'on a découvert une nouvelle mine de rubis dans le nord du Mozambique1.
Mais qu'importe ce qui s'estompe au fil du temps. Ce qu'il faut retenir avant tout, c'est cette passionante épopée, cette quête des pierres précieuses, qui ne doit rien à celle de la fièvre de l'or, et qui continue à attiser les passions et l'admiration des hommes.
Seule demeure la découverte engendrée par le voyage. Et cette flamme du grand voyage est une drogue. C'est une fièvre qui ne vous quitte plus. On la recherche. On l'anticipe. C'est exactement ce que dit Kessel au tout début de son récit : « Les grands voyages ont ceci de merveilleux que leur enchantement commence avant le départ même. On ouvre un atlas, on rêve sur les cartes. On répète les noms magnifiques des villes inconnues... » [ch.I,pp.17-18]. Tout voyageur invétéré se retrouvera en lisant ces lignes. C'est ce qui fait de Kessel un fantastique écrivain du voyage.
Christian Sorand,
Bangkok, mai 2015

Bibliographie :

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